Un travail nécessaire !
Certaines personnes arrivent très facilement à évaluer en temps réel la pertinence de leur action. Probablement par déformation scientifique, mon seul ressenti ne suffit pas à m’aiguiller dans les choix à opérer et j’ai besoin de me baser sur les traces récupérées sur une période assez longue pour être significative dans les productions de mes élèves.
Je pense qu’il est aussi important de prendre ce temps d’analyse pour ne pas être emporté.e par le tourbillon du quotidien de prof, laissant ainsi bien malgré nous ce travail d’évaluation et de réflexion sur nos pratiques passer à la trappe.
Enfin, même si personnellement je n’ai pas besoin de cela pour le faire, je pense qu’analyser ses pratiques c’est aussi lutter contre la routine et les habitudes ancrées, que l’on ne questionne même plus. Un peu à la façon des doxas évoquées par Dominique Bucheton.
Alors régulièrement et particulièrement en fin d’année, je pose tout sur la table et je décortique …
Les éléments à rassembler
Pour mener cette analyse de pratique, j’utilise plusieurs ressources, comme des angles de vue différents, afin d’avoir une vue d’ensemble :
– mon ressenti
– mes observations en classe
– les résultats des évaluations de leçon
– les résultats des évaluations de compétences et la progression au fil des occurrences
– des formations / échanges de pratiques / lectures qui m’ont permise de me questionner
– des échanges avec les IPR
– les retours de mes élèves (à la suite d’une expérimentation ou plus formalisé en fin d’année). Ci-dessous un exemple de bilan de fin d’année réalisé avec mes 6e. Les + et les – ainsi que mes pistes d’amélioration.
Identifier des problèmes professionnels
A partir de tout ceci, j’essaie de dégager un ou 2 problèmes professionnels qui se posent. Ce n’est pas toujours évident de choisir ni même de mettre exactement le doigt dessus. Il faut démêler l’entrelacs… Evidemment dans le même temps, j’ajuste toujours au quotidien mes pratiques et je modifie régulièrement les activités que je propose si elles n’étaient pas adaptés ou mal conçues. L’identification du problème professionnel est un niveau au dessus, il ne s’agit pas d’une activité en elle-même mais d’un grand principe de fonctionnement de la classe, d’une partie de la conduite de mon enseignement. Par exemple, j’ai déjà mené une analyse de pratique sur ces différentes problématiques pour lesquelles vous trouverez des articles sur mon blog :
– comment faire de l’évaluation un outil au service des apprentissages
– comment accompagner l’acquisition de l’autonomie des élèves
– comment réguler les demandes des élèves
– comment présenter le fonctionnement en plan de travail
Comme pour nos élèves, je crois que la problématisation est importante pour donner de l’engagement et pouvoir avancer en testant des hypothèses et en en mesurant les effets.
Chercher des réponses, des pistes
A partir du moment où j’ai identifié la problématique professionnelle sur laquelle je veux travailler, je commence mon brainstorming interne. Il peut durer quelques jours ou des mois. Selon les thèmes, j’essaie de lire sur le sujet, de regarder des conférences en ligne ou d’écouter des podcasts. Parfois cela me nourrit, parfois je sens bien que la réponse est à inventer et je n’y trouve que des garde-fous pour guider les choix que j’aurai à faire.
Mener une démarche d'expérimentation
A la manière des scientifiques, je teste les différentes hypothèses auprès de mes élèves qui sont toujours mes cobayes… Je prends le temps de bien avoir installé la méthode si les résultats ne sont pas immédiatement positifs car il faut parfois du temps pour moi comme pour les élèves de nous approprier les choses. Je modifie ensuite légèrement si besoin… c’est parfois un travail de fourmi ! Vous pourrez aussi retrouver un article qui montre cette constante adaptation dans le cadre de la création d’un jeu.
Prendre le temps d'instituer
Une fois que j’ai trouvé un fonctionnement qui me convient parce qu’il est efficient et que j’en ai mesuré les effets, je me laisse le temps de le faire vivre un long moment avant de le requestionner. Il faut du recul pour pouvoir vraiment mesurer la portée sur le long terme et pour que mon expérience me permette de vraiment puiser le meilleure dans la méthode choisie.
Et puis un jour, si je vois que certains signaux m’alertent, je remettrai le sujet sur la table…